Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/76

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détails ; je glane seulement quelques souvenirs échappés ou négligés comme de peu d’importance ; d’ailleurs, Carl Sand obtiendra toujours un privilège d’intérêt.

En sortant de la résidence par une galerie latérale, nous rencontrâmes l’église des Jésuites, bâtie en style rococo, dont la grille est un chef-d’œuvre de serrurerie du temps. Je n’oserais affirmer que le portail ne soit pas orné de divinités mythologiques ; peut-être aussi sont-ce de simples allégories chrétiennes ; mais alors la Foi ressemblerait bien à Minerve, et la Charité à Vénus. Du reste, le théâtre est situé tout en face, et ses muses classiques paraissent être de la même époque et des mêmes sculpteurs. C’est un magnifique bâtiment qui tient la moitié de la place. Deux rues plus loin, nous arrivâmes à la maison de Kotzebue, qui n’a rien de remarquable à l’extérieur. On sait tout ce qui s’y passa. Carl Sand, arrivé le matin même, vint demander à parler à l’écrivain célèbre, qui était soupçonné d’avoir vendu sa plume à la Russie. On fit entrer le jeune homme dans une pièce du rez-de-chaussée. Ce jour-là même (c’était dans la soirée), Kotzebue recevait du monde, plusieurs dames venaient d’arriver. À peine Kotzebue fut-il entré dans la chambre où Sand l’attendait, que ce dernier se jeta sur lui et le frappa d’un poignard. La fille de Kotzebue entra la première et se précipita en criant sur le corps de son père. Sand,