Page:Nerval - Petits Châteaux de Bohême, 1853.djvu/63

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sa prétention et me confesser son mensonge. Voilà de nos jeunes fous à la mode ; rien ne leur fait obstacle, ils sont les vainqueurs et les préférés de toutes les femmes, et la liste de don Juan ne leur coûterait que la peine de l’écrire. Certainement, d’ailleurs, si cette beauté nous trompait l’un pour l’autre, ce ne serait pas à la même heure. Allons, je crois que l’instant approche, et que je ferais bien de me diriger du côté de la Villa-Reale, qui doit être déjà débarrassée de ses promeneurs et rendue à la solitude. Mais en vérité n’aperçois-je pas là-bas Marcelli qui donne le bras à une femme ?… Je suis fou véritablement ; si c’est lui, ce ne peut être elle… Que faire ? Si je vais de leur côté, je manque l’heure de mon rendez-vous… et, si je n’éclaircis pas le soupçon qui me vient, je risque, en me rendant là-bas, de jouer le rôle d’un sot. C’est là une cruelle incertitude. L’heure se passe, je vais et reviens, et ma position est la plus bizarre du monde. Pourquoi faut-il que j’aie rencontré cet étourdi, qui s’est joué de moi peut-être ? Il aura su mon amour par Mazetto, et tout ce qu’il m’est venu conter tient à quelque obs-