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lorely.

daires, on entendait résonner toutes les harmonies possibles de l’acier frappant sur l’airain. Je me suis enfui vers la salle consacrée aux cuirs.

C’est là le triomphe de l’industrie de Nassau. La sellerie offre de beaux échantillons de harnachements, dont pourront profiter nos modernes chevaliers. On fabrique aussi, à Wiesbaden, des meubles en laque de Chine, dont les amateurs feront bien de se méfier. C’est presque du chinois pur. — J’ai remarqué aussi des lyres perfectionnées, des pipes en corne de cerf, et des oiseaux imités en cire. — Quelques pianos reproduisent dans la dernière salle, sous les doigts des personnes chargées de les vendre, l’effet des pendules qu’on avait entendues en entrant.

Je me suis rendu, au sortir de cette exposition dramatique, à la maison de conversation, située au fond d’une place entourée de galeries, où l’on étale d’autres produits commerciaux vendus généralement par de jolies filles coiffées du chapeau tyrolien. On entre ensuite au cabinet de lecture ; là, j’ai trouvé les journaux français qui avaient paru l’avant-veille de mon départ.

— Le jeu est fait, rien ne va plus !

Telle est la phrase que j’ai entendue dans les salons. Je me suis échappé à travers les jardins, qui, du reste, sont délicieux.

Au café de la Kursaal, on m’a dit que le prince avait l’habitude de parcourir en calèche, à sept heures, les allées de la promenade. Mais il commençait à pleuvoir, et, craignant de ne pas jouir du seul spectacle encore possible à Wiesbaden, celui de la légitimité passant en revue ses derniers fidèles, j’ai pris le chemin de fer de Francfort.

La ville n’a guère changé malgré les révolutions ; les promenades qui l’entourent depuis 1815, et qui remplacent ses fortifications, ont seules gagné de l’ombrage et de la fraîcheur. Arrivé le soir, j’étais, du reste, plus avide de spectacle que de promenades, et je me suis informé bien vite de ce qu’on jouait au grand théâtre. — On jouait Faust avec la musique de Spohr.