Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/146

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à regretter qu’il n’ait pas tenu assez compte de l’observation fondamentale de M. de Bonald sur la révélation du langage, devenu une des origines les plus fécondes de nos idées.

M. Royer-Collard se contenta, la première année, de lire à son auditoire des fragments de la traduction réduite et condensée à l’aide de laquelle il avait fait passer la philosophie de Reid dans notre langue ; seulement, il tournait, par des commentaires vifs et pressants, contre Condillac, le dominateur de nos écoles, les armes aiguisées par la philosophie écossaise contre Locke et Hume, dont l’influence était prépondérante en Angleterre. Le professeur s’affermissait dans ses études philosophiques par cet enseignement préliminaire, dans lequel il racontait les idées de Reid plutôt encore qu’il n’affirmait les siennes, et il se préparait ainsi à élever son vol plus haut dans le cours de l’année suivante.

Dans cette seconde année, en effet, son cours fut moins historique que dogmatique ; plus sûr de sa méthode, plus maître de son sujet, il ne craignit pas de marcher sans le secours de son guide, et il présenta une analyse plus précise et plus complète du grand fait de la perception et des notions environnantes, dégagé et distingué de la sensation avec laquelle l’école de Condillac, comme celle de Locke, l’avait confondu. Par cette distinction, M. Royer-Collard adoptait et motivait la belle variante que Leibnitz avait ajoutée au système de Locke, et qui renversait ce système : Non, tout ce qui est dans l’intelligence ne vient pas