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et bien d’autres barrières que Machiavel lui-même a admirés ; ce qui est vrai, c’est que la chanson peut devenir une puissance en France, et il était réservé à M. de Béranger de l’apprendre à ceux qui l’ignoraient.

Né en 1780[1], sous l’ancienne monarchie, dans la rue Montorgueil, au sein de ce Paris populeux, bruyant, affairé, goguenard ; de ce Paris parisien, dans le sens où l’on dit la Bretagne bretonnante, au fond de l’arrière-boutique d’un tailleur[2], ce dont il faut certes se garder de rougir, mais ce dont il se vante un peu trop, car ce n’est pas plus une gloire qu’une honte, Pierre-Jean de Béranger avait neuf ans à l’époque de la prise de la Bastille, et il l’a dit lui-même, si jeune qu’il fût, il avait gagné, au contact de la révolution, la fièvre révolutionnaire. Peu de temps après, il fut envoyé à Péronne, auprès d’une tante du côté de son père, qui tenait une hôtellerie, et

  1. Le 17 août.
  2. Dans ce Paris plein d’or et de misère,
    En l’an du Christ mil sept cent quatre-vingt,
    Chez un tailleur, mon pauvre et vieux grand-père,
    Moi nouveau-né, sachez ce qui m’advint :
    Rien ne prédit la gloire d’un Orphée
    À mon berceau, qui n’était pas de fleurs ;
    Mais mon grand-père, accourant à mes pleurs,
    Me trouve un jour dans les bras d’une fée.
    Et cette fée, avec de gais refrains,
    Calmait le cri de mes premiers chagrins.

    Il suffit, pour motiver cette remarque, de rapprocher cette chanson de celle qui a pour refrain :

    Je suis vilain, vilain, vilain.