Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/246

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

opinions que madame de Staël exposait sur l’Allemagne. Elle exprimait ce qu’elle avait senti ; or c’est d’elle que M. de Fontanes avait dit, non sans justesse, au commencement du siècle : « Ce qu’elle sent est toujours plus vrai que ce qu’elle pense[1]. » Son livre, parmi tant d’avantages, avait encore celui de s’étendre à tout. Ce n’était pas tel on tel trait particulier de l’Allemagne ; c’était l’Allemagne tout entière avec sa physionomie extérieure, ses sites, ses traditions, ses mœurs, ses institutions, ses idées, sa littérature, ses hommes d’État, ses poëtes, ses philosophes, ses historiens, ses artistes, qui apparaissait tout à coup devant la France, en se couronnant de cette auréole que le talent des grands peintres fait rayonner sur les personnages de leurs tableaux.

Il faut signaler ici quelques résultats principaux du livre De l’Allemagne. D’abord, les intelligences se trouvaient préparées par cet ouvrage d’une lecture attrayante, populaire dans les salons, et écrit avec un talent sympathique aux lecteurs français, à l’étude bienveillante des chefs-d’œuvre de la littérature allemande, et des sources intellectuelles et morales où sont puisés les formes et l’esprit de cette littérature. On rencontre dans cet ouvrage le point de départ d’un mouvement d’idées, dont plus tard nous aurons à tracer le développement : le germe de la réforme romantique est dans le livre De l’Allemagne. Madame de Staël, dans

  1. Fontanes s’exprimait ainsi dans un article publié en 1800 par le Mercure.