Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

eurent une influence fâcheuse ; ils contribuèrent à jeter les esprits dans le culte de la liberté idéale qui peut devenir la plus dangereuse ennemie de la liberté pratique. On ne saurait dire combien sa théorie des génies méconnus et des grandeurs ignorées devait avoir aussi de succès en France, et quelle funeste influence elle exerça. Il écrivait précisément dans une époque où la démocratie allait lutter en faveur des supériorités individuelles contre les principes traditionnels et les pouvoirs établis. Qu’est-ce, au fond, que la démocratie, sinon la candidature des supériorités possibles qui s’agitent à la porte de l’édifice social pour s’emparer du pouvoir placé au dedans, tandis que la monarchie est une grande existence politique permanente qui, entourée d’institutions stables, défend le pouvoir contre les ambitions individuelles, tout en s’aidant, pour l’exercer, des capacités que la Providence a placées dans chaque époque ? La démocratie démonte tous les quarts d’heure, sous prétexte de la remonter, l’horloge que la monarchie monte pour des siècles. N’importe, il y a un charme décevant dans la démocratie : elle flatte l’orgueil de notre nature, et console et satisfait cette haine de bas en haut qui a entassé tant de ruines ; or lord Byron entrait dans tous ses plans et dans ses passions en faisant apparaître, aux esprits amoureux de leurs grandeurs présumées, tous ces Napoléon ensevelis sous leur colonne par une aveugle destinée, coupable de ne pas les avoir placés au-dessus. Les inconvénients de cette tendance littéraire