Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/277

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Ces affinités mystérieuses, ces secrètes sympathies qui existaient entre l’homme et l’époque, se retrouvent dans tous les détails des poésies de M. de Lamartine. Ne vous étonnez point du charme que le lecteur de ce temps éprouve à le suivre sur ces beaux lacs, au milieu de cette nature si calme et si paisible, dans cette vie méditative et solitaire, loin du bruit des hommes et du fracas des événements. Cette époque sort elle-même des champs de bataille de l’empire, toute poudreuse de sa route, toute brûlante de l’incendie dont la dernière lueur vient de s’éteindre dans le sang. Elle est fatiguée de cette vie publique et générale qui a longtemps absorbé tout sentiment individuel ; elle ne veut plus marcher du même pas, au son du tambour, groupée tout entière autour du même drapeau ; elle rompt les rangs, elle dit adieu à la discipline ; chacun reprend l’indépendance de sa pensée, la liberté de ses sentiments ; chacun veut vivre de sa vie propre, de ses émotions personnelles. On laisse là l’action pour l’idée, la vie occupée pour la vie méditative. Or, il semble qu’en suivant M. de Lamartine sur le golfe de Baïa, ou dans les grands bois jaunis par l’automne, l’époque sente descendre sur elle cette fraicheur et ce repos dont elle a besoin comme lui.

Cette poésie individuelle est l’épopée du siècle, parce que ce sentiment de recueillement que M. de Lamartine exprime, chacun l’éprouve au sortir de cette lon-


    cède sous ce titre : la Providence, personnifient cette lutte qui se montre partout dans les poésies de M. de Lamartine.