Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/332

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Paris la visite victorieuse que nous lui avions faite à Vienne, à Berlin, à Moscou. La seconde invasion surtout avait laissé de pénibles et douloureux souvenirs au cœur des populations, non-seulement à cause des maux et des violences inséparables de la guerre, mais à cause de ce grand désastre de Waterloo qui avait couché toute une armée française dans ce lit funèbre, et donné, dans notre histoire, un sinistre écho aux noms de Poitiers, Crécy et Azincourt. Ajoutez à cela la dureté impolitique que L’Europe avait montrée envers la France dans les traités de Vienne, sans comprendre, malgré l’avertissement aussi sensé que patriotique donné par M. de Bonald[1], que les sociétés européennes, inté-

  1. « Non, ce n’est pas à la France qu’il importe d’aller jusqu’au Rhin ; les habitants de l’ancienne France n’en seront ni plus ni moins heureux ; son gouvernement n’en sera ni plus ni moins stable et fort ; c’est pour l’Europe que cette mesure politique est nécessaire, parce qu’alors, et seulement alors, la France sera utile à tous les États, et ne sera dangereuse pour aucun. La France serait au repos comme une arme détendue, et toute l’Europe y serait avec elle et par elle ; et ce ressort, qu’on voudrait en vain comprimer, aurait perdu en s’étendant son élasticité… C’est alors que la France pourrait donner l’exemple unique au monde d’une société qui, parvenue à ses derniers développements, n’ayant rien à craindre, rien à désirer, rien à acquérir et rien à perdre, en paix avec tous ses voisins, tranquille sur toutes ses frontières, peut agir sur elle-même et employer ses talents naturels et ses connaissances acquises à perfectionner ses lois, ses mœurs, son administration, sa constitution ; à tout réparer, à tout maintenir dans l’ordre, à fermer les plaies faites à la religion, à la justice, à la morale, à la propriété, ces bases fondamentales de l’ordre social… Et la France, peut-être, peut seule conserver