Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/423

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le cours d’un torrent, le poussaient quelquefois à des effets oratoires qui devenaient des témérités politiques. Il avait excité l’admiration de ses adversaires comme de ses amis, par la manière dont il avait défendu, au commencement de la session de 1819, la loi sur la presse, qui consacrait une liberté jusque-là inconnue en France. On l’avait vu monter jusqu’à dix fois, dans la même séance, à la tribune, avec une verve inépuisable et une puissance de logique qui dominait toutes les objections. Jamais cceur plus honnête et plus disposé à sceller l’alliance définitive de la royauté et des libertés nationales ; jamais éloquence plus éclatante et plus digne de déterminer et de célébrer cette heureuse solution d’un long et douloureux problème ne parurent dans les assemblées politiques. Cependant un jour arriva où M. de Serre aussi s’arrêta découragé. Il comprit que ce n’était pas seulement la jouissance des libertés publiques que l’on voulait, mais le triomphe de la révolution et l’humiliation de la monarchie. De ce jour, son âme équitable, qui avait trouvé des accents si sévères pour flétrir du haut de la tribune les assassinats commis dans le Midi contre le général Lagarde et le général Ramel, et l’impunité assurée aux meurtriers par la faiblesse des témoins, du jury et des tribunaux, se révolta avec la même énergie contre les prétentions intolérables du parti révolutionnaire. Lorsque, dans la discussion sur le rappel des bannis, il entendit les voix de la gauche s’élever tumultueusement et revendiquer le retour des régicides, il foudroya de cette véhémente