Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/475

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trouvé là. Peut-être la bouche suppliante de l’homme assassiné les a-t-elle appelés ; pas un n’a répondu, pas un n’était sur le théâtre de l’assassinat. Peut-être le mourant a-t-il demandé du secours, aucun secours n’a pu lui être donné. Il est mort seul, délaissé de la nature entière.

Cet homme avait une âme, il était né chrétien. Peut-être à son heure dernière, les premiers sentiments de son enfance se sont-ils réveillés en lui ; peut-être, suivant la belle parole de ce général chargé par le gouvernement impérial d’arrêter le souverain pontife, sa première communion lui est-elle apparue dans ce moment suprême où l’intelligence de l’homme, à demi penché sur les gouffres de l’éternité, ne voit plus le temps que comme une ombre qui s’efface et qui blanchit à l’approche du jour sans fin. Les yeux du mourant ont alors interrogé les profondeurs de la forêt, et leur ont demandé celui qui soulage les consciences du fardeau des souvenirs qui les accablent. Le mourant est demeuré seul. Cette suprême consolation n’était pas réservée à son agonie. Aucun prêtre n’a pressenti que, dans les détours cachés de ce bois, il se passait une scène de mort qui réclamait son ministère sacré. Quand tout a été dit, que l’homme a eu rendu le dernier soupir, qu’on a trouvé le cadavre, l’affaire a dû s’instruire, la justice a dû rechercher les auteurs du crime, le parquet a dû appeler sur le criminel la vindicte des lois, les tribunaux ont dû prononcer. Mais le voile qu’on cherchait à percer s’appesantissait et s’épaississait tou-