Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/66

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définissait l’homme « un animal débruti, » et que les savants, plutôt que d’admettre le mystère sublime de l’homme fait à l’image de Dieu, préféraient, pour se donner la triste joie de nier l’existence du Créateur, accepter l’ignoble mystère de l’homme éclos d’un œuf de poisson, on comprend que M. de Bonald, pour mieux s’éloigner de cette déplorable extrémité, se soit jeté dans une définition d’un spiritualisme un peu excessif. Les meilleurs esprits ne peuvent échapper à cette influence de répulsion qu’exercent sur eux certaines erreurs par l’excès de leur grossièreté. Du reste, le philosophe se trompa plutôt sur les termes de la définition de l’homme que sur l’homme même ; car c’est en étudiant la grande question de l’origine des idées qu’il arriva à cette démonstration de la révélation primitive du langage, qui est son plus beau titre philosophique devant la postérité.

« La solution du problème de l’intelligence, dit M. de Bonald, peut être présentée sous cette formule : Il est nécessaire que l’homme pense sa parole avant de parler sa pensée. Ce qui veut dire qu’il est nécessaire que l’homme sache la parole avant de parler, proposition évidente et qui exclut toute idée d’invention de la parole par l’homme. Cette impossibilité physique et morale que l’homme ait inventé la parole, peut être rigoureusement démontrée par la considération des opérations de notre esprit, combinée avec le jeu de nos organes. Il faut des paroles pour penser ses idées, comme il faut des idées pour parler et être en-