Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/70

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forces de la raison, tout un système de connaissances qui nous viennent de plus haut,.

Dans ces derniers temps, un illustre théologien a vivement attaqué la doctrine de M. de Bonald sur la formation des idées, tout en admirant la beauté de sa démonstration de la révélation du langage[1]. Il y a sans doute, dans cette doctrine, quelque chose d’un peu absolu, et c’est là en général le défaut d’une des qualités de l’intelligence de ce grand philosophe. C’est, en effet, pousser loin les choses que de ne faire commencer les plus simples opérations de cette puissance intelligente que Dieu a mise en nous, et que l’école scolastique appelle très-bien l’entendement agissant (intellectus agens), qu’au moment où le langage est transmis à l’homme ; mais, d’un autre côté, les critiques de M. de Bonald ne vont-ils pas un peu loin eux-mêmes en décidant que, sans le secours de la parole, l’esprit s’élève à l’idée de l’être, de ses modifications et de ses rapports, de l’espèce et du genre, du général et du particulier, du concret et de l’abstrait, de causes et d’effets, de principe et de conséquence, du bien et même du mal moral ? N’est-ce pas tomber dans un excès opposé à celui qu’on reproche à M. de Bonald, que d’affirmer que la parole, nécessaire pour formuler ces idées, n’est pas nécessaire pour se les former, de sorte que toutes les idées seraient formées par l’esprit agissant sur les sensations, indépendamment

  1. Le père Ventura.