Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/71

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de la parole, qui ne serait indispensable que pour arriver à la notion de ces objets dont les sens ne sauraient transmettre aucun fantôme à l’esprit, tels que la notion de Dieu, celle de la spiritualité et de l’immortalité de l’âme, celle des devoirs clairs et précis de l’homme envers Dieu, envers ses semblables, envers lui-même ? Si la parole n’est pas nécessaire pour former les idées, ceux qui ont suivi la formation successive des idées chez les enfants conviendront du moins qu’elle est bien utile dans ce travail intérieur. Ajoutons qu’il sera toujours très-difficile de savoir jusqu’où s’étendent les idées que l’homme peut former sans la parole, parce que l’homme qui ne parle point encore, l’enfant, et celui qui ne parlera jamais, du moins par l’organe de la voix, le muet, sont élevés par des gens qui possèdent le langage et qui, par le geste ou la parole, facilitent le travail de leur esprit, en leur apprenant à représenter les objets par des signes. Ce qu’on peut dire, c’est que M. de Bonald, dans plusieurs parties de sa philosophie, n’a pas assez marqué l’activité innée de l’entendement, qui agit même en l’absence de la parole, mais pour lequel cependant la parole est le plus puissant des instruments et le plus indispensable des auxiliaires.

Ce n’est pas, pour M. de Bonald, une médiocre gloire que d’avoir attaché son nom, dans la philosophie, à cette belle démonstration de la révélation du langage, et, dans la morale, à une lutte incessante et à la fin couronnée de succès contre le divorce. Ses