Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/74

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alors même qu’on le traite de souverain, est le sujet d’une situation et des lois divines qui régissent la nature humaine ; d’une loi fondamentale, si elle résulte de sa constitution naturelle, de son passé, de sa religion, de ses mœurs, de son caractère, des nécessités que lui créent sa position géographique, ses intérêts permanents de toute nature ; d’une situation factice et arbitraire, si elle résulte, comme cela arrive quelquefois, d’un concours de circonstances passagères et d’une crise déterminée par les passions ou les calculs politiques. Mais, dans l’un et l’autre cas, en ayant l’air de commander, le peuple obéit. Il est donc vrai de dire que la souveraineté est en Dieu seul. Le créateur de toutes choses est le seul, en effet, qui ait posé ces lois fondamentales que Montesquieu a appelées les rapports des choses, et dont les lois écrites ne sont que l’expression. L’homme, alors même qu’il reconnaît et déclare ces lois fondamentales, ne les fait pas, il les subit ; et quand il veut les nier, elles ont tôt ou tard raison de sa résistance. Les partisans les plus absolus de la souveraineté du peuple sont obligés de reconnaître, au moins implicitement, cette vérité, et J. J. Rousseau, qui a poussé, on le sait, cette théorie aussi loin qu’elle peut aller, déclare lui-même que « si le législateur, se trompant dans son objet, établit un principe différent de celui qui naît de la nature des choses, l’État ne cessera d’être agité jusqu’à ce qu’il soit détruit ou changé, et que l’invincible nature ait repris son empire. » C’est reconnaître, en langage