Page:Nichault - Le Mari confident.pdf/14

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sur parole et à le prendre pour ce qu’il se donnait, c’est-à-dire comme le Bonaparte de la finance.

Ce ridicule le sauvait de celui de chercher à dissimuler son origine pauvre ; loin d’en rougir, il s’en vantait, et c’était pour prouver combien, l’attribuant à son génie, il s’en enorgueillissait, qu’il venait étaler sa fortune là où l’on avait vu sa misère.

À peine établi dans son château, il invita à dîner ce qui restait dans le village de camarades de son père, mort depuis deux ans. Il leur fit l’accueil le plus cordial, tout en leur rappelant, par ses manières protectrices, la distance que l’argent mettait entre eux.

Le maire, le curé eurent les places d’honneur à côté de la maîtresse de la maison, femme ni belle, ni laide, d’un cœur noble, d’un esprit timoré, dont le premier mérite était aux yeux de son mari dans une soumission à toute épreuve. Il l’avait épousée à New-York, c’était la fille d’un négociant américain avec lequel il était associé. Sa dot, employée dans d’heureuses spéculations, avait triplé la fortune de Thomassin ; dès qu’il s’était vu assez riche pour tenir une bonne maison dans son pays, il avait projeté d’y revenir ; et pour être plus sûr de n’être pas contrarié dans ce dessein par sa femme,