Page:Nichault Les Malheurs d un amant heureux.djvu/120

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sortie philanthropique, en parut médiocrement flattée ; mais elle rit de la petite épigramme qui vint après. La voici :

Contre un plagiaire.

    Quoiqu’en disent certains railleurs,
    J’imite, et jamais je ne pille.
    — Vous avez raison, monsieur Drille,
    Oui, vous imitez… les voleurs.

Par Ch. Morel.

Mais un doux murmure annonce quelque nouveau favori d’Apollon : on se rapproche de la tribune, tous les yeux s’y fixent, une femme parait. C’est Sapho elle-même ; sa taille élancée, son regard audacieux, sa voix pure et sonore, tout prévient en faveur de son talent ; mais on s’étonne du courage qui lui fait braver cette crainte de paraître, cette timide pudeur, divin attribut des femmes, qui embellit autant leurs talents que leurs charmes. Cependant c’est pour défendre les droits de ce sexe enchanteur, que madame P*** s’expose à la critique ; elle veut combattre par de bons vers le poëte qui dit aux belles :

    Rassurez les grâces confuses ;
    Ne trahissez point vos appas ;
    Voulez-vous ressembler aux muses ?
    Inspirez ; mais n’écrivez pas[1].

À cet avis, plus galant que sévère, madame P*** répondait :

    De l’étude des arts la carrière est ouverte ;
    Osons y pénétrer. Eh ! qui pourrait ravir
    Le droit de les connaître à qui peut les sentir.

Chacun prenait parti dans cette querelle poétique, où, contre l’ordinaire, tout le monde avait raison ; car si la manie des

  1. Lebrun.