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AU PAYS DE L’AMOUR BLEU

— Tahia !

La Targuia leva sur l’étrangère un visage fier et sombre d’un merveilleux ovale, au front large, aux lèvres charnues.

— Tahia… Je voudrais connaître des hommes de la Kouddia ?

— N’y pense pas ! C’est impossible !

— Mais pourquoi ? Ne suis-je pas femme comme toi, et n’ai-je point mes séductions ?

Elle hocha la tête.

— Ton visage est trop pâle, tes cheveux trop blonds et les « manières de blancs » ne séduisent pas les Touareg. Les hommes de ma tribu sont des nobles, des guerriers et des amants, mais leur race, leur bravoure et leurs caresses sont pour nous seules.

— Tahia… Je voudrais tant, répéta Marie-Ange…

Maints voyageurs sont venus dans le Hoggar, les uns à la poursuite d’Antinéa, les autres promenant à deux un bonheur neuf, certains partant à l’assaut des pics inviolés.

Marie-Ange s’était donnée pour prétexte de peindre. Mais elle était hantée par ces hommes voilés, minces, bondissants, aux yeux allongés et fardés, aux gandouras ouvertes sur les côtés laissant voir leur peau bleue.

Pour les atteindre, pour soulever leur litham, elle avait abordé, après les oasis sahariennes, fleuries et chantantes, le Tadémaït désespéré, puis s’était enfoncée dans les gorges d’Arak, hantées de djenoun. Elle avait suivi la