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Ou bien était-ce prêcher la mort que de sanctifier tout ce qui contredisait et déconseillait la vie ? — Ô mes frères, brisez, brisez-moi les vieilles tables.

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11.

Ceci est ma pitié à l’égard de tout le passé que je le vois abandonné, —

— abandonné à la grâce, à l’esprit et à la folie de toutes les générations de l’avenir, qui transformeront tout ce qui fut en pont d’eux-mêmes !

Un grand despote pourrait venir, un démon malin qui forcerait tout le passé par sa grâce et par sa disgrâce : jusqu’à ce qu’il devienne pour lui un pont, un signal, un héros et un cri de coq.

Mais ceci est l’autre danger et mon autre pitié : — les pensées de celui qui fait partie de la populace ne remontent que jusqu’à son grand-père, — mais avec le grand-père finit le temps.

Ainsi tout le passé est abandonné : car il pourrait arriver un jour que la populace devînt maître et qu’elle noyât dans des eaux basses.

C’est pourquoi, mes frères, il faut une nouvelle noblesse, adversaire de tout ce qui est populace et despote, une noblesse qui écrirait de nouveau le mot « noble » sur des tables nouvelles.

Car il est besoin de beaucoup de nobles pour qu’il y ait de la noblesse ! Ou bien, comme j’ai dit jadis en parabole : « Ceci précisément est de la divinité, qu’il y ait beaucoup de dieux, mais pas de Dieu ! »

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