vrai qu'il existe d'innombrables sentiers et d'innombrables ponts et d'innombrables demi-dieux qui veulent te conduire à travers le fleuve ; mais le prix qu'ils te demanderont ce sera le sacrifice de toi-même ; il faut que tu te donnes en gage et que tu te perdes. Il y a dans le monde un seul chemin que personne ne peut suivre en dehors de toi. Où conduit-il ? Ne le demande pas. Suis-le. Qui donc a prononcé ces paroles : « un homme ne s'élève jamais plus haut que lorsqu'il ne sait pas où son chemin peut le conduire ? » Mais comment pouvons-nous nous retrouver nous-mêmes ? Comment l'homme peut-il se connaître ? Ce sont là des questions difficiles à résoudre. Si le lièvre a sept peaux, l'homme peut s'en enlever sept fois septante sans qu'il puisse dire ensuite : « Cela est maintenant véritablement toi, ce n'est plus seulement une enveloppe. » De plus, c'est là un geste cruel et dangereux que de fouiller ainsi soi-même sa chair pour descendre brutalement, par le plus court chemin, dans le fond de son être. Comme il arrive facilement qu'on se blesse, sans qu'aucun médecin puisse nous guérir ! A quoi cela servirait-il, en outre, si tout témoigne de notre être, nos amitiés et nos inimitiés, notre regard et nos serrements de mains, notre mémoire et ce que nous oublions, nos livres et les traits de notre plume ? Mais il y a un moyen pour faire cette enquête importante.
Que la jeune âme jette un coup d'œil sur sa vie passée et qu'elle se pose cette question : Qui as-tu véritablement aimé jusqu'à présent ? Qu'est-ce qui t'a attiré et, tout à la fois, dominé et rendu heureux ? Fais défiler devant tes yeux la série des objets que tu as vénérés.