Page:Nietzsche - Considérations inactuelles, I.djvu/204

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de l’ouvrage de Diogène Laërce sur la vie et la doctrine des philosophes grecs : « Une fois de plus j’ai ressenti cette impression souvent éprouvée déjà, que ce caractère transitoire et éphémère des pensées et des systèmes de l’homme m’affecte d’une manière plus tragique que ce que l’on nomme les vicissitudes de la vie réelle. »

Non, une telle inondation historique, abêtissante et violente, n’est certainement pas indispensable à la jeunesse, ainsi que le montre l’exemple des anciens ; bien plus elle est un danger, et un danger des plus graves, comme le montre l’exemple des modernes. Or, considérez à présent l’étudiant d’histoire lui-même, à qui est échu en héritage ce sens blasé trop précoce qui s’aperçoit déjà chez lui dès son jeune âge. Il s’est assimilé la « méthode » de travail personnel, le tour de main et le ton distingué de son maître ; un petit chapitre du passé soigneusement isolé du reste est le champ d’expériences livré à sa sagacité et à la méthode qu’il a acquise ; il a déjà produit, ou même, pour employer une expression plus altière, il a déjà « créé ». Dès lors, il est devenu, par ce haut fait, serviteur de la vérité et maître dans le domaine de l’histoire. Si, comme enfant déjà, il était « fait », le voilà maintenant trop fait : vous n’avez qu’à le secouer et la sagesse tombera à grand fracas de ses branches. Mais cette sagesse est pourrie, et chaque pomme a son ver. Croyez-m’en, quand