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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE



321.

La presse. — Si l’on considère qu’aujourd’hui encore tous les grands événements publics se glissent secrètement et comme voilés sur la scène du monde, qu’ils sont cachés par des faits insignifiants, côté desquels ils paraissent petits, que leurs effets profonds, leurs contre-coups ne se manifestent que longtemps après qu’ils se sont produits, — quelle importance peut-on alors accorder à la presse, telle qu’elle existe aujourd’hui, avec sa quotidienne dépense de poumons pour hurler, assourdir, exciter et effrayer ? — la presse est-elle autre chose qu’un bruit aveugle et permanent qui détourne les oreilles et les sens vers une fausse direction ?

322.

Après un grand événement. — Un peuple ou un homme dont l’âme a été mise au jour par un grand événement éprouve ensuite généralement le besoin d’un enfantillage ou d’une grossièreté, tout aussi bien par pudeur que pour se reposer.

323.

Être un bon Allemand, c’est cesser d’être Allemand. — On ne trouve pas seulement, comme on avait cru jusqu’ici, les différences nationales dans les nuances entre les différents degrés de culture. Ces différences n’ont souvent rien de durable. C’est pourquoi toute argumentation basée sur le caractère national engage si peu celui qui travaille à la transformation des convictions, celui qui fait