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HUMAIN, TROP HUMAIN, DEUXIÈME PARTIE

plus de trente ans. C’est alors que l’on s’habitua à exiger qu’en prononçant le mot « allemand » le mot vertu fût sous-entendu : et jusqu’à nos jours on ne s’est pas encore complètement déshabitué de ce travers. — Ce réveil moral, soit dit en passant, n’a fait que porter préjudice à la connaissance des phénomènes moraux, comme on pourrait presque le deviner, et il n’a pas manqué non plus de provoquer des mouvements rétrogrades. Qu’est toute la philosophie morale allemande depuis Kant, avec toutes ses ramifications françaises, anglaises et italiennes ? Un attentat mi-théologique contre Helvétius, un désaveu formel de la liberté du regard, lentement et péniblement conquise, de l’indication du bon chemin qu’Helvétius avait fini par exprimer et résumer de la façon qu’il fallait. Jusqu’à nos jours Helvétius est, en Allemagne, le mieux honni parmi tous les bons moralistes et tous les hommes bons.

217.

Classique et romantique. — Les esprits, au sens classique, tout aussi bien que les esprits au sens romantique — les deux espèces existeront toujours — portent en eux une vision de l’avenir : mais la première catégorie fait jaillir cette vision de la force de son temps, la seconde de sa faiblesse.

218.

L’enseignement de la machine. — La machine enseigne sur elle-même l’enchaînement des foules humaines, dans les actions où chacun n’a qu’une