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LE VOYAGEUR ET SON OMBRE

il y a une émigration de l’intelligence : on passe la frontière pour lire et pour écrire de bons livres. Mais on en arrive par là à transformer toujours davantage la patrie abandonnée par l’esprit, en une sorte de gueule avancée de l’Asie qui aimerait dévorer la petite Europe.

232.

La folie de l’État. — L’amour presque religieux pour la personne du roi fut transporté chez les Grecs sur la polis, lorsque ce fut fini de la royauté. Une idée supporte plus d’amour qu’une personne et surtout elle crée moins de déceptions à celui qui aime (— car plus les hommes se savent aimés, plus ils manquent généralement d’égards, jusqu’à ce qu’ils finissent par ne plus être dignes de l’amour et qu’il se produise une scission). C’est pourquoi la vénération pour la polis et l’État fut plus grande que ne fut jamais auparavant la vénération pour les princes. Les Grecs sont les fous de l’État de l’histoire ancienne, — dans l’histoire moderne ce sont d’autres peuples.

233.

Contre ceux qui ne ménagent pas leurs yeux. — Ne serait-il pas possible de démontrer dans les classes cultivées en Angleterre qui lisent le Times une diminution de l’acuité visuelle qui irait grandissant de dix ans en dix ans ?

234.

Grandes œuvres et grande foi. — Celui-ci pos-