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LE VOYAGEUR ET SON OMBRE

se venger, le mépris de la vengeance étant interprété et considéré comme une vengeance sublime et très sensible. — D’où il résulte qu’il ne faut rien faire de superflu.

260.

Erreur de ceux qui vénèrent. — Chacun croit dire à un penseur quelque chose qui l’honore et qui lui est agréable en lui montrant qu’il est arrivé, de lui-même, exactement à la même pensée et, plus encore, à la même expression de la pensée ; et pourtant il est fort rare que le penseur se réjouisse d’une pareille communication, bien au contraire, il arrive souvent qu’il devienne alors méfiant de sa pensée et de l’expression de celle-ci : il décide, à part lui, de les soumettre un jour toutes deux à une révision. — Lorsque l’on veut faire honneur à quelqu’un il faut se garder d’exprimer une concordance : elle place à un même niveau. — Dans beaucoup de cas, c’est affaire d’habileté mondaine d’écouter une opinion comme si elle n’était pas la nôtre, et même comme si elle dépassait notre horizon : par exemple lorsqu’un vieillard plein d’expérience ouvre une fois par exception les tiroirs de sa sagesse.

261.

Lettre. — La lettre est une visite qui ne se fait pas annoncer, le facteur est l’intermédiaire de ces surprises impolies. On devrait avoir tous les huit jours une heure pour recevoir sa correspondance et prendre chaque fois un bain après.