Page:Nietzsche - Le Crépuscule des Idoles - Le Cas Wagner - Nietzsche contre Wagner - L'Antéchrist (1908, Mercure de France).djvu/176

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
LE CRÉPUSCULE DES IDOLES

choses. Si l’on en arrache un concept essentiel, la croyance en Dieu, on brise en même temps le tout : on ne garde plus rien de nécessaire entre les doigts. Le christianisme admet que l’homme ne sache point, ne puisse point savoir ce qui est bon, ce qui est mauvais pour lui : il croit en Dieu qui seul le sait. La morale chrétienne est un commandement ; son origine est transcendante ; elle est au-delà de toute critique, de tout droit à la critique ; elle n’a de vérité que si Dieu est la vérité,— elle existe et elle tombe avec la foi en Dieu. — Si les Anglais croient en effet savoir par eux-mêmes, « intuitivement », ce qui est bien et mal, s’ils se figurent, par conséquent, ne pas avoir besoin du christianisme comme garantie de la morale, cela n’est en soi-même que la conséquence de la souveraineté de l’évolution chrétienne et une expression de la force et de la profondeur de cette souveraineté : en sorte que l’origine de la morale anglaise a été oubliée, en sorte que l’extrême dépendance de son droit à exister n’est plus ressentie. Pour l’Anglais, la Morale n’est pas encore un problème…

6.

George Sand. — J’ai lu les premières Lettres d’un voyageur : comme tout ce qui tire son origine de Rousseau, cela est faux, factice, boursouflé, exagéré. Je ne puis supporter ce style de tapisserie, tout aussi peu que l’ambition populacière qui aspire aux sentiments généreux. Ce qui reste cependant de pire, c’est la coquetterie féminine avec des virilités, avec