de livres avec autant de difficultés que les évangiles.
Ces difficultés sont d’autre ordre que celles qui
permirent à la savante curiosité de l’esprit allemand de
célébrer ses inoubliables triomphes. Le temps est loin, où,
moi aussi, pareil à tout autre jeune savant, je
savourais, avec la prudente lenteur du philologue raffiné,
l’ouvrage de l’incomparable Strauss. J’avais alors
vingt ans, maintenant je suis trop sérieux pour cela.
Que m’importent les inconséquences de la
« tradition » ? Comment peut-on, en général, appeler
« tradition » des légendes de saints ! Les histoires de
saints sont la littérature la plus équivoque qu’il
y ait : appliquer à elles la méthode scientifique,
s’il n’existe pas d’autres documents, c’est là un procédé
condamné de prime-abord — simple désœuvrement
de savant !…
Ce qui me regarde, moi, c’est le type psychologique du Sauveur. Celui-ci pourrait tenir dans les évangiles, malgré les évangiles, quoique mutilé et chargé de traits étrangers : comme celui de François d’Assise est conservé dans ses légendes, malgré ses légendes. Il ne s’agit pas de la vérité sur ce qu’il a fait, sur ce qu’il a dit, sur la façon dont il est mort : mais de savoir si l’on peut encore se représenter son type, s’il a été « conservé » ? Les tentatives qui ont été faites pour découvrir, même dans les Évangiles, l’histoire d’une « âme », me semblent, autant que je les connais, donner la preuve d’une détestable frivolité psychologique. M. Renan,