la victoire sur soi-même, nécessaires pour trouver
une vérité, même des plus petites, manquent encore
totalement. — Les supplices des martyrs, pour le
dire en passant, ont été un grand malheur dans
l’histoire : ils ont séduit… Déduire comme font tous
les faibles d’esprit, y compris les femmes et le
peuple, qu’une cause qui peut mener au martyre
(ou même qui provoque une épidémie de sacrifices,
comme le premier christianisme) ait quelque valeur,
— déduire de la sorte empêche le libre examen,
paralyse l’esprit d’examen et de précaution. Le martyr
nuit à la vérité… Aujourd’hui encore, il n’est besoin
que d’une certaine crudité dans la persécution pour
créer à des sectaires quelconques une réputation
honorable. Comment ! une cause peut gagner en valeur
si quelqu’un lui sacrifie sa vie ! — Une erreur qui
devient honorable est une erreur qui possède un
charme de séduction de plus : croyez-vous,
messieurs les théologiens, que nous vous donnerons
l’occasion de jouerles martyrs pourvos mensonges ?
— On réfute une chose en en démontrant les points
faibles avec égard, — c’est ainsi que l’on réfute
aussi les théologiens… Ce fut la bêtise historique
de tous les persécuteurs, de donner à la cause
adverse l’apparence de l’honorabilité, — de lui
accorder la fascination du martyre… La femme se
met aujourd’hui encore à genoux devant une erreur,
puisqu’on lui a dit que quelqu’un est mort sur la
croix pour cette erreur. La croix est-elle donc un argument ? — — Mais, sur toutes ces choses, quelqu’un seul
a dit le mot dont on aurait eu besoin depuis des
milliers d’années — Zarathoustra.
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L’ANTÉCHRIST