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MÉDITATION


L’orage est en suspens, l’espace se recueille ;
Dans le jardin où brille une vapeur de four,
Les oiseaux ont un cri fané comme une feuille.
Partout gît mollement, fardeau subtil et lourd,
La chaleur insensée qui fait aimer l’amour.
J’ai recherché Ronsard dans la bibliothèque ;
Ma chambre, où les volets emprisonnent le jour
Et d’un tranchant léger et laiteux le dissèquent,
À l’obscure fraîcheur d’un tranquille vallon.
Un blanc magnolia, froid comme une pastèque,
Épanche son parfum de neige et de melon.
Et je vois tout cela avec des yeux si tendres
Qu’ils émettent un chant que l’on devrait entendre.
La pendule, incessante autant que l’univers,
Accompagne humblement, seconde par seconde,
Le tumulte secret et céleste des mondes.
Et j’écoute l’énigme obsédante de l’air