Page:Noailles - Les Vivants et les Morts, 1913.djvu/213

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Accordez-moi de vivre encor chez les vivants,
D’entendre les moulins, le bruit de la scierie,
Le rire des pays égayés par le vent,
Et de tout recevoir avec un cœur qui prie,

Un cœur toujours empli, toujours communicant,
Qui ne veut que sa part de la tâche des autres,
Et qui ne rêve pas à l’écart, évoquant
L’auréole orgueilleuse et triste des apôtres !

Que tout me soit amour, douceur, humanité :
La vigne, le village et les feux de septembre,
Les maisons rapprochées de si bonne amitié,
L’universel labeur dans le secret des chambres ;

Et que je ne sois plus, — au-dessus des abîmes
Où mon farouche esprit se tenait asservi, —
Comme un aigle blessé en atteignant les cimes,
Qui ne peut redescendre, et qu’on n’a pas suivi !