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ON ÉTOUFFAIT D’ANGOISSE ATROCE…


On étouffait d’angoisse atroce, et l’on respire.
Il semble que l’on ait désormais vu le pire,
Qu’on est sorti vivant du cercle de l’enfer,
Que c’est fini ! Le jour remonte, calme et clair ;
On entend les rumeurs des routes, des villages,
Le chant des coqs, le doux roulis des engrenages :
Halètement de fer que font dans le lointain
Les usines, fumant sur le léger matin…
Une haleine de fleurs épaissit les prairies ;
On voit, sur le torrent, écumer la scierie.
Les calmes oliviers, immobiles, songeant,
Reçoivent tout l’azur dans leurs tamis d’argent ;
Et les abeilles, par leurs danses chaleureuses,
Font un voile doré aux collines pierreuses ;
Et l’on est sauf !
Et l’on est sauf !Mais quand reviendront les effrois,
Quand ce sera vraiment pour la dernière fois ;