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POLICHINELLE.



Polichinelle est un de ces grands personnages tout en dehors de la vie privée, qu’on ne peut juger que par leur extérieur et sur lesquels on se compose, par conséquent, des opinions plus ou moins hasardées, à défaut d’avoir pénétré dans l’intimité de leurs habitudes domestiques. C’est une fatalité attachée à la haute destinée de Polichinelle. Il n’y a point de grandeur humaine qui n’ait ses compensations.

Depuis que je connois Polichinelle, comme tout le monde le connoit, pour l’avoir rencontré souvent sur la voie publique, dans sa maison portative, je n’ai pas passé un jour sans désirer de le connoître mieux ; mais ma timidité naturelle, et peut-être aussi quelque difficulté qui se trouve à la chose, m’ont empêché d’y réussir. Mes ambitions ont été si bornées, que je ne me rappelle pas qu’il me soit arrivé, en ce genre, d’autre désappointement, et je n’en connois point de comparable à l’inconsolable douleur que celui-ci me laisseroit au dernier moment, si j’ai le malheur d’y parvenir sans avoir joui d’un entretien familier de Polichinelle, en audience particulière. Que de secrets de l’âme, que de curieuses révéla-