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Rabelais, Marot, le Cymbalum mundi de Desperriers, le Longus et le Plutarque d’Amyot, les Essais de Montaigne, ont été, à la vérité, réimprimés fort souvent dans le XVIIIe siècle, mais avec une insouciance ou plutôt avec un mépris de l’orthographe et du texte qui fait de la plupart de ces somptueuses éditions des monuments de mauvais goût. Ajoutez, pour comble de malheur, à ce vice radical, l’importunité obséquieuse des clefs et des commentaires, clefs absurdes, commentaires insignifiants, dont le moindre défaut est de ne rien apprendre aux gens qui savent quelque chose, et si peu que ce soit. Il faut, pour tout commentaire à de semblables écrivains, de rares et courtes notes grammaticales qui soient propres à jeter quelque lumière sur l’histoire de la langue. Tout ce qui excède la simple portée de ce travail n’est que l’étalage d’un luxe fastidieux et souvent nuisible.

Depuis que le plan immense de la satyre de Rabelais est connu et apprécié des bons esprits, tout le monde sait à quoi s’en tenir sur la fable ridicule à laquelle on veut plier ses ingénieuses inventions. M. Brunet vient de faire voir clairement, quoique sa modestie n’ait exprimé cette idée que sous une forme dubitative, combien il seroit convenable de rattacher à une nouvelle édition de ses ouvrages la première leçon des Chroniques de Gargantua, et je dois insister sur cette proposition pour éclaircir les expressions vagues et mal mesurées dont je me suis servi dans un article antérieur. Cet essai primitif n’a rien de commun avec les contrefaçons impertinentes qui parurent quelques années après, et où furent mis à contribution, sans goût et sans esprit, le double Gargantua, et le premier livre de Pantagruel. Sous ce nouvel aspect, Rabelais attend un nouvel éditeur, et ne demande qu’un bon glossaire.

La naïveté délicieuse des ravissantes amours de Daphnis et Chloé a été de plus en plus altérée par les imprimeurs modernes, qui ont sans doute regardé leurs variantes presque sacrilèges comme des merveilles de délicatesse