Page:Noel - Le Rabelais de poche, 1860.djvu/181

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dès le matin, ils quittaient la ville et s’en allaient à Gentilly, ou à Boulogne, ou à Montrouge, ou au pont Charenton, ou à Vanves, ou à Saint-Cloud, et là ils passaient toute la journée à se réjouir, raillant, gaudissant, faisant bonne chère, buvant d’autant, jouant, chantant, dansant, se vautrant en quelque beau pré, dénichant des passereaux, prenant des cailles, pêchant aux grenouilles et aux écrevisses.

Mais bien que cette journée fût passée sans livres et lectures, elle n’était point passée sans profit. Car en ce beau pré, ils récitaient par cœur quelques plaisants vers de l’Agriculture de Vergile, de Hésiode, du Rustique de Politian ; composaient quelques plaisants poèmes en latin, puis les traduisaient, par rondeaux et ballades, en langue française. En banquetant ils séparaient l’eau du vin, comme l’enseigne Caton de Re rustica, et Pline, avec un gobelet de lierre ; lavaient le vin en plein bassin d’eau, puis le retiraient avec un embut (entonnoir) ; ils faisaient aller l’eau d’un verre dans l’autre, bâtissaient plusieurs petits engins automates, c’est-à-dire se mouvant d’eux-mêmes (L. 1. chap. xxiii et xxiv).


Éducation monacale. Gargantua voulut de tout son sens étudier à la discrétion de Ponocrates. Mais celui-ci, pour le commencement, ordonna qu’il ferait à sa manière accoutumée, afin de découvrir par quel moyen, en si