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PRÉFACE

cien Létinois, jeune homme aussi châtain que lui-même, une chevelure blond vénitien, avec le nez de François Ier — par la seule raison que cette forme de nez plaisait à lui, Nouveau, — et puis un teint non bruni comme il arrive aux grands garçons vivant à la campagne, mais pareil à cette nacre rose des petites princesses dodues, coiffées d’or et de feu, que peignit Velasquez. Pour l’ensemble un très réduit minimum de modelé, le relief étant chose brutale et nos yeux voulant être frappés moins des formes que des couleurs. La seule concession faite concernait l’expression qui était en vérité « parlante ». Cela rassurait les parents plutôt déconcertés, d’abord, par ce portraitiste venant leur dire : « Vous avez eu tort de désirer un brun ! » Je crois voir encore le regard timide, interrogateur, que m’adressait la bonne Mme Létinois, quand, l’année d’après, je fus mis en présence de cette œuvre si autoritaire. J’entends ses « Oui !… son air, là !… son air… alors ça… tout de même… oui… c’est ben not’Lucien !… » Et il semble que Verlaine ait voulu reproduire en partie les observations maternelles, qui répondaient si bien à sa propre sensibilité :


Ce portrait qui n’est pas ressemblant,
Qui fait roux tes cheveux noirs plutôt,
Qui fait rose ton teint brun plutôt,
Ce pastel, comme il est ressemblant !
Car il peint la beauté de ton âme,
La beauté de ton âme un peu sombre,