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AU LECTEUR


L’art est l’interprétation de la nature, mais il s’en faut que l’artiste dispose de ressources équivalentes pour atteindre à l’illusion de la vie selon qu’il est peintre ou sculpteur. Les deux arts diffèrent essentiellement. Au peintre, les scènes historiques, le portrait, l’anecdote, l’arbre, la plante, la fleur, l’oiseau, la mer, les montagnes, le désert, l’aurore et le crépuscule. Au sculpteur, l’homme et l’animal, observés dans leur type bien plus que dans leur individualité ; l’homme et l’animal isolés ou groupés avec parcimonie. Une bataille, une chasse sont intraduisibles en sculpture. Plus étrangère encore au ciseau du statuaire est la représentation des sites, de la fleur ou de l’oiseau. Les sites ne séduisent que par l’ampleur du cadre, l’indécision des détails, la poésie de l’horizon. Le marbre et le bronze n’autorisent pas des proportions trop grandes ; le marbre et le bronze sont tangibles, par conséquent rien de vague, d’indécis dans l’œuvre sculptée. La fleur et l’oiseau ne séduisent pas par leur forme. C’est la couleur qui attire vers eux. J’excepte toutefois l’aigle ou le vautour dont les grandes proportions prêtent à la sculpture. Mais on ne conçoit guère un rouge-gorge en marbre ou une mésange en bronze.

Sans doute la sculpture polychrome permet à l’artiste d’étendre quelque peu les frontières du relief. Mais notre œil n’est pas familiarisé avec ce genre d’interprétation. C’est le marbre, le bois ou le bronze qu’il faut prévoir comme parure dernière de l’œuvre modelée. D’ailleurs, n’est-ce pas l’argile que travaille le sculpteur lorsqu’il cherche l’expression de sa pensée ? L’argile est monochrome. Les couleurs, si l’artiste en