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FRAGMENTS

comme la Réforme fut « luthérienne » ? Est-ce que le protestantisme sera, une fois de plus, fixé d’une manière contre nature, comme gouvernement révolutionnaire ? Des lettres feront-elles simplement place à d’autres lettres ? Cherchez-vous aussi le germe de la corruption dans l’ancienne organisation et dans l’esprit ancien ? Et croyez-vous qu’une organisation meilleure rendra l’esprit meilleur ? Ô si l’esprit des esprits pouvait vous envahir et si vous renonciez à la folle pensée de modeler l’histoire et l’humanité, et de leur donner votre direction ! Ne sont-elles pas indépendantes, puissantes par elles-mêmes et presque infiniment prophétiques et dignes d’êtres aimées ? Mais nul ne songe à les étudier, à les suivre, à en tirer un enseignement, à marcher de leur pas, et à croire à leurs promesses et à leurs signes.

En France, on a beaucoup fait pour la religion, en lui enlevant les droits civils et en ne lui laissant que des droits familiers, non pas en une personne, mais en ses innombrables individualités. Il faut que, maintenant comme une humble orpheline étrangère, elle gagne d’abord les cœurs, et qu’on l’aime partout, avant que de nouveau on l’honore publiquement, et que dans les choses de ce monde, on veuille encore lui demander des conseils amicaux et la direction des consciences.

Là où il n’y a pas de dieux règnent les spectres.