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INTRODUCTION

pagne voisine, il fit la connaissance de Sophie von Kühn. Le premier regard qu’il jeta sur cette apparition belle et merveilleuse décida de sa vie. Nous pouvons même dire que le sentiment qui maintenant le pénétra et l’inspira fut la substance et l’essence de toute sa vie. Souvent dans le regard et le visage d’un enfant, il y a une expression que nous sommes obligés d’appeler surhumaine ou céleste, car elle est d’une beauté trop angélique et trop éthérée ; et d’ordinaire, à la vue de visages ainsi purifiés et presque transparents, la crainte nous vient qu’ils ne soient trop fragiles et trop délicatement façonnés pour cette vie ; que c’est la mort ou l’immortalité qui nous regarde si profondément dans ces yeux éclatants ; et trop souvent, un prompt dépérissement transforme en certitude nos tristes pressentiments. Ces visages sont bien plus impressionnants encore lorsque leur première période est heureusement passée et qu’ils viennent s’offrir à nous sur le seuil fleuri de la puberté. Tous ceux qui ont connu cette merveilleuse fiancée de notre ami s’accordent à dire que nulle description ne peut donner une idée de la grâce et de la céleste harmonie dans lesquelles se mouvait ce bel être, de la beauté qui brillait en elle, de la douceur et de la majesté qui l’environnaient. Novalis devenait poète chaque fois qu’il en parlait.