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INTRODUCTION

Thuringe, sa vie s’élargissait, et sa seconde fiancée l’attendait en souriant dans la douce impatience des noces. Jamais il n’avait senti plus près de lui la présence tiède et puissante du bonheur. Il faut se méfier, comme de la mort, de cette sensation de plénitude, de force, d’espérance et de joie. C’est la réaction instinctive et suprême de la vie, qui sait tout, contre le malheur, qui s’approche et qui débarquera demain. Quand nous sentons trop vivement notre bonheur, c’est qu’il nous frappe en passant sur l’épaule, pour nous faire ses adieux. Brusquement, durant l’été de l’année 1801, au moment où toutes ses joies étaient sur le point de se réaliser, la mort inattendue d’un de ses frères le trouble si profondément, qu’un vaisseau se rompt dans sa poitrine : il rend le sang en abondance. On le transporte à Dresde, puis à Weissenfels, où il traîne quelque temps encore au milieu des grands espoirs et des grands projets des phtisiques, et meurt le 25 mars 1801. Il n’avait pas accompli sa vingt-neuvième année.