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LES DISCIPLES À SAÏS

du cœur, qui ne l’admire et ne la cherche qu’en ses détails, doit visiter soigneusement ses hôpitaux et ses ossuaires.

Nous nous trouvons avec la Nature en des relations aussi incroyablement diverses qu’avec les hommes ; et de même qu’à l’enfant elle se montre puérile, et se penche gracieusement sur son cœur puéril, elle est divine avec les dieux et correspond à leur intelligence supérieure. On ne peut dire qu’il y a une Nature, sans dire une chose surabondante, et tout effort vers la vérité lorsqu’on parle de la Nature éloigne de plus en plus du naturel. On a déjà gagné beaucoup lorsque l’effort pour comprendre entièrement la Nature s’ennoblit en désir, en un désir tendre et discret, qui plaît à l’être étrange et froid, qui peut compter alors sur une amitié bien fidèle. C’est en nous-mêmes un instinct mystérieux qui se répand d’un point central infiniment profond. Et lorsque nous entoure la merveilleuse Nature perceptible à nos sens et celle que nos sens n’atteignent pas, il nous semble que cet instinct est une attraction de la Nature, une expression de notre sympathie pour elle. Mais l’un cherche encore une patrie derrière ces formes bleuâtres et lointaines ; une amante de sa jeunesse, des parents et des frères, de vieux amis, et un passé très cher. Un autre croit qu’un avenir plein de vie se cache derrière ces choses, et tend vers un monde nouveau ses deux mains qui désirent. Bien peu s’arrêtent tranquillement au milieu des beautés qui les entourent, et se contentent de les saisir dans leur intégrité et dans leurs relations.