Page:Novicow - La Critique du darwinisme social.pdf/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

nous jugeons meilleurs pour mille raisons, qui nous plaisent davantage. Maintenant, les êtres qui nous plaisent davantage sont ceux qui nous ressemblent le plus ou ceux qui se trouvent pourvus de facultés que nous désirons et que nous n’avons pas. Notre idéal serait de posséder la beauté, la santé, l’omniscience et la vie éternelle. Nous considérerions un être réunissant ces dons (ressemblant beaucoup aux dieux de l’Olympe grec) comme parfait. C’est précisément parce que l’évolution de la matière vivante, soi-disant sous la pression de la lutte pour l’existence, semble s’acheminer vers la formation d’un être de ce genre, que le darwinisme a eu un si grand succès

Mais est-il vrai que la lutte universelle, sans trêve et sans arrêt, pousse à la création d’un tel être ? Qui oserait l’affirmer en présence des millions de faits qui prouvent le contraire ? La lutte entre le microbe de la tuberculose et l’homme est aussi une lutte pour l’existence entre deux organismes vivants. Est-ce à dire cependant que, dans cette lutte, le meilleur (à notre point de vue l’homme) l’emporte toujours ? Hélas, on sait bien qu’il n’en est pas ainsi et que, la plupart du temps, ce bacille informe, ce protozoaire arrêté aux degrés inférieurs de la vie parvient à vaincre un animal aussi extraordinairement complexe et aussi admirablement constitué que l’homme. On peut donner de nombreux exemples de ce genre. Il y a de vastes régions où nous sommes obligés de reculer devant des insectes (fourmis, moustiques), devant des animaux infimes (rats, serpents), ou devant des animaux puissants (tigres, panthères). Or, que signifie reculer ? Cela signifie que, dans la lutte pour l’existence, ces êtres inférieurs gagnent du terrain et que nous en perdons. En d’autres termes, ces êtres inférieurs tuent un certain nombre d’hommes déjà existants, et, de plus, empêchent un grand nombre d’autres de voir la lumière du jour. L’équilibre général de la vie peut aussi bien se déplacer en faveur de l’être inférieur que de l’être supérieur. Et il n’en est pas