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cause du progrès est absolument insoutenable. Il faut dire ce qui est conforme aux faits : les homicides collectifs sont suivis tantôt de progrès, tantôt de régressions. Or, s’il en est ainsi, c’est un pur sophisme de soutenir que l’homicide collectif, dans le cas où il est suivi d’un progrès, est la cause de ce progrès. Est cause un phénomène qui partout et toujours est suivi d’un autre. Comme l’homicide collectif ne précède pas partout et toujours le progrès, l’homicide collectif n’est pas la cause du progrès. Au contraire, comme les institutions politiques plus parfaites précèdent toujours le progrès, les institutions politiques plus parfaites sont la cause du progrès. Or, comme les institutions politiques sont la suite de mouvements cérébraux, ce sont ces mouvements cérébraux, et non les mouvements musculaires, sous forme d’homicide collectif, qui assurent le progrès.

On connaît le détour que prennent les darwiniens pour faire accepter leur sophisme. Ils ne peuvent pas affirmer que l’homicide collectif soit la cause directe du progrès. Le soir d’une bataille, quand cent mille hommes gisent sur le sol, les uns tués, les autres dans les râles de l’agonie, il est difficile de prétendre que, dans ce moment même, ces tueries et ces souffrances produisent le progrès. Aussi aucun darwinien ne soutient-il une proposition aussi saugrenue. Mais les darwiniens affirment que la préparation de ces férocités est justement ce qui favorise le progrès, car le peuple le mieux préparé obtient la victoire. Or, la préparation à la guerre comporte une série d’actes qui affinent l’intelligence, donc l’homicide collectif affine l’intelligence, donc il fait le progrès. Il est à peine nécessaire de dire combien faible est cette parade. D’abord l’argument principal subsiste en entier : tout dépend de ce que le vainqueur fait après la victoire. S’il établit de meilleures institutions, ce sont ces institutions, et nullement la bataille, qui font le progrès. En second lieu, il y a un argument encore plus décisif. Si la somme d’efforts intellectuels, employés pour