Page:Observations sur Le festin de pierre.djvu/24

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choquer la pudeur, et blesser la chasteté des oreilles ; il a reformé jusques aux habits et aux gestes de cette Courtisane, et peu s’en est fallu qu’il ne l’ait rendue scrupuleuse. Les Vierges et les Martyrs ont paru sur le Theatre et l’on faisoit couler insensiblement dans l'âme la pudeur et la Foy, avec le plaisir et la joye. Mais Moliere a ruiné tout ce que ce sage Politique avoit ordonné en faveur de la Comedie, et d’une fille vertueuse, il en a fait une hypocrite. Tout ce qu’elle avoit de mauvais avant ce grand Cardinal, c’est qu’elle estoit coquette et libertine ; elle escoutoit tout indifferemment, et disoit de mesme tout ce qui lui venoit à la bouche ; son air lascif et ses gestes dissolus rebutoient tous les gens d’honneur, et l’on n’eust pas veu en tout un siecle une honneste femme luy rendre visite. Moliere fait pis, il a deguisé cette coquette, et sous le voile de l’hypocrisie, il a caché ses obscenitez et ses malices ; tantost il l’habille en religieuse, et la fait sortir d’un couvent : ce n’est pas pour garder plus estroitement ses vœux ; tantost il la fait paroistre en paysanne, qui fait bonnement la reverence quand on lui parle d’amour ; quelquefois c’est une innocente qui tourne par des equivoques estudiées l’esprit à de sales pensées, et Moliere, le fidele Interprete de sa naïfveté, tasche de faire comprendre par ses postures, ce que cette pauvre Niaise n’ose exprimer par ses paroles. Sa critique est un commentaire pire que le texte, et un supplement de malice à l’ingenuité de son Agnès, et confondant enfin l’hypocrisie avec l’impieté, il a levé le masque à sa fausse de-