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dauphins, de n’être pas comme le vulgaire des rois. Quand nous sommes malades, nous devenons bons. Charles V, prince valétudinaire, s’instruisit encore à l’école du malheur. Les règnes désastreux de Jean et de Henri III donnèrent l’expérience à Charles V et à Henri IV leurs successeurs ; l’éducation de ce dernier, les vicissitudes de sa fortune, en firent ce prince que nous regrettons encore ; et si Louis XII fut le père du peuple, remercions la grosse tour de Bourges. Tant que les enfants des rois seront élevés sur les degrés du trône, livrés à des instituteurs courtisans, nourris de ces leçons qui font les rois par la grâce de Dieu, et non par la grâce du peuple ; complimentés dès le berceau par les robes rouges et les soutanes violettes, qui s’empressent d’aduler bassement l’auguste marmot ; tant qu’on ne dira pas du prince héréditaire, comme Henri IV de son fils, cet enfant est à tout le monde ; que la nation n’aura pas le droit de diriger exclusivement son éducation, de l’arracher de la cour et du sein empesté de la flatterie dont il suce la maxime avec le lait, il sera impossible aux rois de n’être pas ce qu’ils ont toujours été.

Eh ! pourquoi vouloir que le bonheur d’un empire dépende d’un précepteur, que la destinée d’un peuple soit dans la main d’un seul homme ? Ce mot de Cicéron à Atticus m’a toujours frappé : César voudra-t-il ressem-