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en France un million de théistes, observait il y a vingt-cinq ans le patriarche de Ferney ; depuis, ce nombre s’est accru jusqu’à l’infini, et très probablement le théisme deviendra peu à peu la religion catholique, c’est-à-dire, universelle. L’estimable M. Rabaud, dont le civisme et les talents font tant d’honneur au clergé de Genève, demande des temples pour quatre millions de protestants. Le temple du théiste est l’univers ; mais la Lanterne demande des églises, c’est-à-dire, des lieux d’assemblée pour huit millions de théistes. Cette religion serait digne de la majesté et des lumières du peuple français. Dépouillée des mensonges des autres cultes, qui tous ont défiguré la divinité, elle ne conserverait que ce qu’ils ont d’auguste, la reconnaissance d’un être suprême et l’idée de la justice, inséparable de la récompense des bons et de la punition des méchants. Le philosophe exerce le sacerdoce de cette religion ; et il y a cet avantage pour le peuple, qu’il ne lui faut ni dîme, ni casuel, ni abbaye, ni prieuré, ni croupe, ni pension sur les bénéfices. Après avoir été entendre l’abbé Maury prêcher aux Quinze-Vingts le célibat, on irait à Saint-Sulpice ou à Saint-Roch suivre un carême ou un avent de l’abbé Raynal, ou de Jean-Jacques Rousseau. Les cérémonies religieuses et touchantes ne manqueraient pas à ce culte. Que l’Église lui restitue tout ce qu’elle a emprunté du paga-