Page:Ohnet - L’Âme de Pierre, Ollendorff, 1890.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

petit sentier bordé de lycopodes, serpentant entre les palmiers, les daturas et les gommiers, Clémence, vêtue d’une robe de foulard rose, serrée à la taille par une ceinture de vieil argent ciselé, ornée de grenats cabochons, s’avançait souriante, un petit arrosoir à la main.

— Bonjour, docteur, quelle heureuse fortune vous amène ? dit-elle.

D’un geste gracieux elle montra sa main noircie par un peu de terre de bruyère, et gaiement :

— Moi, je suis le médecin des fleurs. J’étais en train de donner une consultation à ces plantes…

— Elles vont bien ?

— Pas mal, merci !

Elle montra son arrosoir :

— Je leur ai fait prendre un peu de tisane… Mais qu’est-ce qui me vaut le plaisir de votre visite ?…

— Ne puis-je être venu simplement pour vous voir ?

Elle le regarda froidement :

— Bien gentil ! Très touchée de la politesse !… Mais je vous connais… Vous n’êtes pas un homme à femmes, vous. Alors, si vous vous présentez ici, c’est que vous avez pour cela une raison sérieuse.

— Eh bien ! j’ai une raison, en effet… J’avais rendez-vous avec Jacques, ce matin. Il m’a manqué de parole, et j’ai craint qu’il ne fût malade.

— Ah ! fit Clémence d’un air songeur.

Elle marcha vers un petit rond-point, où étaient rangées une table de fer et des chaises, et s’asseyant :

— Malade ! Oui certes, il l’est.

Elle leva les yeux avec gravité et, touchant son joli front du doigt :

— Malade de là, surtout !