Page:Osmont - Le Mouvements symboliste, 1917.djvu/64

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-= -^ LE SYMBOLISME <^ -»

Turc, était le plus mystique des êtres. Un songe, véhément comme un désir inassouvi, habitait dans ses grands yeux pâles. La musique, qu'il aimait avec passion, exaltait encore ce rêve : tout était musical en lui, même ses gestes, ses silences. Sa prose. Tune des plus cherchées, des plus châtiées qui existent, est écrite comme une symphonie, plus en vue de la dic- tion que de la lecture, et cet abus des italiques et des majuscules, qu'il a été si facile aux médiocres de lui reprocher, n'a pas d'autre but que d'indiquer aux yeux les crescendo et les rinforzando de cette musique verbale. Mais cette musique est pleine d'idées que seul pouvait marier ce vaste cerveau contradictoire. Pour le comprendre, pour bien pénétrer l'œuvre philosophique de Villiers de l'Isle-Adam et son expression si personnelle, il faut d'abord comprendre l'homme.

Breton et catholique, il le fut jusque dans les moelles, du premier au dernier jour de sa vie. Sa race celtique se révélait au premier regard, ne fût-ce que par ses yeux, des yeux d'oiseau de mer, mais sans la fixité presque brutale du Normand : des yeux d'oiseau de mer accoutumés aux brumes grises. Ces yeux-là n'étaient pas faits pour considérer le monde tel que nous sommes contraints à le vivre. Il ne voulut le connaître que (( sous les espèces de l'éternité ». Des passés éblouissants lui avaient laissé leur mirage. Le grand Breton se souvenait d'avoir vécu par ses