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CARTHON

la mort des jeunes guerriers et tournaient avec crainte leurs regards vers la mer ; elles prenaient les blanches vagues pour des voiles éloignées, et des larmes étaient sur leurs joues.

Le soleil se leva sur l’Océan, et dans le lointain nous découvrîmes une flotte. Elle s’approcha comme le brouillard de la mer, et versa sur la côte sa guerrière jeunesse. Le chef se tenait au milieu, comme le cerf au milieu de sa bande : son bouclier est incrusté d’or, sa démarche est majestueuse. Il s’avance vers Selma, et ses mille guerriers marchent derrière lui.

« Va avec le chant de la paix, dit Fingal, va, Ullin, vers le roi des glaives : dis-lui que nous sommes puissants dans la guerre ; que les fantômes de nos ennemis sont nombreux, mais qu’ils sont renommés ceux qui ont été fêtés dans mon palais. Ils montrent les armes de mes aïeux dans les terres lointaines[1]. Les fils de l’étranger les admirent et bénissent les amis de la race de Morven, car notre nom s’est fait entendre au loin, et les rois du monde en ont tremblé au milieu de leurs armées. »

Ullin partit avec ses chants. Fingal s’appuyait sur sa lance ; il voyait dans son armure son redoutable ennemi : il bénit le fils de l’étranger. « Que tu es majestueux, fils de l’Océan ! dit le roi des forêts de Morven. Ton épée à ton côté est un rayon de feu ; ta lance, un sapin qui défie la tempête ; la face changeante de la lune n’est pas plus large que ton bouclier. La rougeur de la jeunesse est sur ton visage ; douces sont les boucles de ta chevelure ! Mais cet arbre tombera peut-être et sa mémoire sera oubliée. La fille de l’étranger sera triste en regardant la mer houleuse. Les enfants diront : « Nous

  1. C’était la coutume alors de changer d’armes avec les hôtes.