Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
72
CROMA

bruit de tes pas à ton retour ; car mes yeux ne peuvent plus te voir, ô Fovargormo à la blonde chevelure ! » Il part, il combat l’ennemi, il tombe. Rothmar s’avance vers Croma. Celui qui tua mon fils approche avec toutes ses lances !

Ce n’est pas ici le temps de remplir la coupe ! Je répondis et saisis ma lance. Mes guerriers virent le feu de mes yeux ; tous se levèrent autour de moi. Toute la nuit nous marchâmes sur la bruyère. Le matin blanchissait à l’Orient, une étroite et verte vallée se découvre devant nous avec le cours sinueux de son torrent. La sombre armée de Rothmar était sur ses rives, dans tout l’éclat de ses armes. Nous combattîmes dans la vallée ; ils prirent la fuite et Rothmar périt sous mon épée. Le jour n’était pas descendu dans l’Occident, lorsque je portais ses armes à Crothar. Le vieux héros les toucha de ses mains, et la joie brilla sur toutes ses pensées.

Le peuple se rassemble dans le palais. Les coupes du festin résonnent ; dix harpes sont accordées et cinq bardes s’avancent et chantent tour à tour les louanges d’Ossian. Ils versaient dans leurs chants le feu de leurs âmes et les cordes répondaient à leurs voix ! La joie de Croma fut grande, car la paix était de retour sur ses collines. La nuit descendit avec le silence, le matin revint avec la joie. Nul ennemi, dans les ténèbres, n’était venu avec sa lance étincelante. La joie de Croma fut grande, car le farouche Rothmar n’existait plus !

J’élevai ma voix pour chanter Fovargormo, tandis qu’on déposait ce jeune chef dans la terre. Le vieux Crothar était présent ; mais on ne l’entendit point soupirer. Il cherche la blessure de son fils ; il la trouve au cœur. La joie se lève sur la face du vieillard ! Il s’avance vers Ossian et parle : « Roi des lances, dit-il, mon fils n’est pas tombé sans gloire ! Le jeune guerrier n’a point fui ; il a rencontré la