Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rents ils vinrent des montagnes. Chacun d’eux se précipite en rugissant de la colline. Brillants sont les chefs des combats sous l’armure de leurs pères ; sombres et ténébreux, leurs guerriers les suivent, comme le cortège des nuages pluvieux derrière les rouges météores du ciel. Le bruit des armes qui se choquent, s’élève ; les dogues gris y mêlent leurs hurlements ; par intervalles éclatent les chants de guerre, et la chancelante Cromla les répète à l’entour. Sur la noire bruyère de Lena ils se tiennent comme le brouillard qui obscurcit les collines en automne, quand, sombre et déchiré, il se pose sur leurs cimes et lève sa tête dans les cieux.

« Salut, dit Cuthullin, fils des étroites vallées ! Salut, chasseurs du chevreuil ! Une autre chasse se prépare, semblable à cette vague qui roule sombrement sur la côte. Combattrons-nous, fils de la guerre, ou cédrons-nous la verte Érin à Lochlin ? Parle, Connal, toi le premier des hommes ! toi qui brises les boucliers, tu as souvent combattu Lochlin ; lèveras-tu la lance de tes pères ? »

« Cuthidlin, répliqua tranquillement le chef, la lance de Connal est acérée ; elle aime à briller dans la bataille, à se teindre du sang de milliers de héros ! Mais quoique ma main incline pour le combat, mon cœur est pour la paix d’Érin[1]. Ô toi le premier dans la guerre de Cormac, vois la noire flotte de Swaran. Ses mâts sont nombreux sur nos côtes comme les roseaux sur le lac de Lego. Ses vaisseaux sont des forêts entourées de brouillards, quand les arbres cèdent l’un après l’autre au vent de la tempête. Nombreux sont les chefs de son armée ; Connal est pour la paix ! Fingal lui-même éviterait son bras, lui, le premier des mortels. Fingal qui disperse les puissants, comme les vents orageux emportent les

  1. Érin, nom de l’Irlande.